Strasbourg, capitale mondiale du cabaret satirique

par | 31 octobre 2023 | Culture, Idées

Chaque mois retrouvez la Veausifferation de Roger Siffer !

 

Les premières traces écrites de satire en Alsace se trouvent dans le Narrenschiff de Sébastien Brant en 1494, illustré, excusez du peu, par Dürer. Au passage, notez que les illustrations montrent des musiciens jouant de la cornemuse. Ce fut l’instrument le plus populaire et le plus traditionnel chez nous. Les Bretons n’ont qu’à bien se tenir. Brant est un brin moralisateur mais ses saillies contre les hommes qui se gominent les cheveux ne manquent pas de brillantine.

L’ouvrage a été traduit dans plusieurs langues et fut un best-seller. Premier livre d’histoire drôle, le Rollwagenbüchlein, écrit par le curé Jörg Wickram (1555). On le lit en voyage pour éviter les blagues salaces. 1730, Pfingstmontag, pièce de Arnold (préfacé par Goethe en personne) qui inventa à propos d’un mariage, les haut-rhinois mal dégrossis (pléonasme). L’allemand pédant (c’est pas nouveau) l’alsacien couche-toi qui émaille ses dires de français (pas nouveau non plus), manquent plus que les Lorrains. Le Cocorico Hansi bleu blanc rouge, poursuivi pour avoir désinfecté la chaise sur laquelle était assis un prussien, a écrit ce chef d’œuvre qu’est le Professeur Knatschké (1947) où il veut germaniser les rues de Paris : Saint-Germain en Laye devenant St-Germanus in der Milch.

Il fabriqua des huîtres à base de hareng parce que c’est moins cher pour les allemands. Germain Muller étudia le théâtre à Strasbourg et à Stuttgart. Incorporé de force, il imagina son propre enlèvement par son amoureuse pour nier une désertion qui punirait ses parents (Schirmeck). Il fuit en Suisse couché sous un train, (voir le livre de Bernard Jenny sur Germain, « en Alsace le contraire est toujours vrai »). Il rencontre Alfred Rasser, élu communiste bâlois qui l’initie au cabaret pour le théâtre aux armées. Rasser le Suisse a rendu visite à Mao Zedong, résultat plusieurs années de boycott de son Théâtre Fauteuil. Il a publié un livre sur toutes les censures qu’il a subi. Germain invitera Rasser régulièrement à Strasbourg, (actuellement salle blanche à la Librairie Kléber), et Rasser fait venir le Barabli à Bâle. Dans le sillage de Germain et de son cabaret Barabli de nombreuses troupes de théâtre alsacien se mettent à la satire (Tony Troxler, Gaston Goetz, etc.).

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Roger Siffer & Germain Muller

J’ai eu l’honneur et le bonheur de faire deux saisons chez Germain, dont on pourrait commémorer le centième anniversaire de la naissance. J’ai passé toutes les soirées derrière le rideau, dans les coulisses, pour essayer de comprendre comment sa seule apparition faisait rire la salle. J’ai attendu que Germain rejoigne les comiques au ciel pour lancer nos premières revues. La première revue bilingue de la Chouc’ s’intitula « Traut’tram », avec Catherine, ficelée sur les rails. Puis cette idée schizophrène : deux salles, deux revues, une alsacienne, une française, et les comédiens qui courent d’une salle dans l’autre.

À partir du 10 novembre, le nouveau bébé, la nouvelle revue de la Chouc’ s’appelle Flamm’s Olympique, Olympicher Flamm’s. Bien sûr, Jeanne en recevra plein sur les culottes avec sa politique de stationnement, mais il y a beaucoup de sujets de société : les vide-greniers pourris, le compost et même le contournement de Châtenois. En alsacien dans une salle, en français dans l’autre, deux fois plus de rire, deux fois plus de plaisir ! Comme on dit à la Chouc’ : quand on est bilingues, on peut dire deux fois plus de conneries, ou comme disent les Allemands « Seid bi ihr lebt doppelt », soyez bi vous vivrez doublement.

 

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Flamm’s olympique – Olympischer flamm’s
29e Revue satirique
Du 10 novembre au 24 mars
www.theatredelachouc.com
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